Par Aurenc Bebja, France – 8 Septembre 2018
Le dimanche, 9 avril 1939, Le Journal publiait quelques confidences sur la reine d’Albanie, suite à une interview réalisée avec une jeune femme nommée Geneviève et élevée en la compagnie de Géraldine au couvent du Sacré-Cœur à Pressbaum, en Autriche.
Voici quelques confidences inédites sur « la rose blanche de Hongrie » :
Souvenirs du couvent du Sacré-Cœur…ou Géraldine d’Albanie était une grande fille infiniment bonne et sage.
« — Mais puisque tu connais la reine Géraldine, dis-nous l’impression que tu en as gardée.
La petite Geneviève que j’interviewe me paraît perplexe.
— Enfin, tu as été élevée en sa compagnie, au couvent du Sacré-Cœur à Pressbaum ; racontes-nous tes souvenirs.
— Oh ! surtout, me répond Geneviève, elle m’a fait manger ce qu’elle a pu me faire manger ! Figurez-vous qu’elle était ma présidente de table. Je dois vous dire qu’au Sacré-Cœur les petites filles ont toujours une présidente, une grande, qui veille sur elles. Quant elle paraissait, les conversations cessaient, car elle était sage et sévère. Elle portait la tête droite et elle s’efforçait à lisser ses cheveux obstinément bouclés.
« Mes enfants, disait-elle, si vous ne mangez pas, vous serez des asticots plus tard, mais jamais des femmes. »
— Et surtout pas des reines, répondions-nous alors ; car nous savions, par une indiscrétion, qu’une vieille bohémienne avait prédit à Géraldine Apponyi qu’elle épouserait un roi.
Quand, pour la blaguer, nous l’appelions « Reine Géraldine », elle ne protestait pas, elle ne se fâchait pas, mais elle ne riait pas non plus. Les grandes la disaient jolie. Elle était aussi très bonne. Quand une petite, avait un ennui, Géraldine était toujours prête à l’aider.
Quand, nous apprîmes au couvent, un an après son départ, qu’elle épousait le roi Zog, nous ne fûmes pas surprises. Le royaume d’Albanie nous sembla simplement un peu petit pour Géraldine. Noua pensions qu’elle serait au moins un jour reine d’Amérique ou du Japon.
Les pauvres mères, elles, étaient éplorées et stupéfaites. Songez donc, une élève du Sacré-Cœur qui épouse un musulman ! N’avait-on pas été jusqu’à dire qu’elle embrassait la religion mahométane ?
Ça, ce n’était pas vrai. Géraldine vint en Autriche quelques semaines avant son mariage et ne manqua pas d’aller voir les mères qui l’avaient élevée. Sut-elle les séduire ? Les gagna-t-elle à leur cause ?
Lorsqu’elle partit pour Tirana, elle emportait les vœux de ses éducatrices et la bénédiction de son confesseur. »
Geneviève ne m’en dira pas davantage. Les événements d’Albanie l’attristent, comme s’il s’agissait de son propre pays. « Pauvre Géraldine, répète-t-elle, pauvre reine Géraldine ! »
Oui, pauvre Géraldine, les destins royaux ne sont pas enviables de nos jours. — D. A. »
Article publié également en albanais : https://www.darsiani.com/la-gazette/rrefimi-i-rralle-per-mbretereshen-geraldine-nga-vajza-e-rritur-me-te-ne-manastirin-e-zemres-se-shenjte-ne-pressbaum-te-austrise/